Expo Henri Desbals

EXPOSITION HENRI DESBALS

TOULOUSE 2012
Souvent très peuplées, soit par des personnages, soit par un motif récurrent, les gravures de Nelly Bonnefis nous emmènent dans une matière picturale mettant le temps de l’expérience et du vécu au cœur du propos. Son cheminement la conduit à utiliser ses matrices à graver de manière répétitive, pour tenter de piéger le réel qui s’échappe dans les rets des variations. Ainsi tout se trouve fragmenté, comme l’image d’une possible réponse, brisée sur des centaines de miroirs. L’espace est tantôt traversé, encombré, quadrillé, déchiré, cerné, brouillé, ou encore dissout. Les formes se superposent, se répondent. Ainsi l’artiste nous questionne sur la notion de mémoire en nous renvoyant la difficulté à recomposer un passé et par là même des souvenirs. Le vocabulaire de la gravure est lui aussi propice à parler de notre histoire : qu’est-ce qui marque, imprime, creuse et se répète ? Entre volonté de figurer l’éphémère et inscrire une trace qui perdurera, Nelly Bonnefis nous parle de la réconciliation avec soi-même. C’est ainsi que plaisir à être et à faire jalonnent ce possible chemin vers l’autre, dans la générosité.

Georgette Alias

Lorsqu’il s’agit de témoigner autour de mon travail plastique, j’ai toujours le sentiment de ne dire que des propos bien sommaires et maladroits. Comment se livrer autrement qu’avec ce qui est dit sur la toile ou le papier? Comment écrire autour d’un travail qui s’impose à moi-même et dont le sens m’échappe le plus souvent ? Comme je le dis à chacune de mes expositions, je ne sais jamais trop ce qui me pousse vers l’estampe ou la peinture si ce n’est la nécessité de dire un peu ce que je suis.
Cet engagement sur la voie de la création se manifeste de manière cyclique et le plus souvent de façon surprenante et énigmatique. Cette expérience sensible constitue pour moi une nécessité, une voie de réalisation personnelle. Elle fonctionne comme un projet de recherche qui vise à récupérer les traces d’une histoire et à en retrouver le sens. C’est un processus qui m’amène à cheminer vers l’intime, l’indicible.
J’inscris sur chaque format la fragilité de nos existences, notre présence et notre effacement à terme. Ils sont au point de départ sans objet. Je suis dans l’ignorance la plus totale tant que le travail pictural n’a pas fait naître la composition finale sur la toile ou le papier. De ce fait, la construction de mon travail plastique procède toujours d’une forme de hasard. Le cheminement jusqu’au résultat final n’est jamais préparé ni raisonné. Ce qui va se décliner sur le format est déterminé par une sorte de dialogue intérieur, par les ressentis et les impressions du moment. Cette part de hasard dans le travail m’intéresse particulièrement. Elle renvoie au non déterminé de la vie puisque dans le fond tout est aléatoire et le plus souvent surprenant.
Le processus pictural oscille entre ce qui se voit et ce qui est masqué dans l’image. L’œil ne peut s’empêcher de chercher et de reconnaître le motif sous la trace, les formes, circuler entre elles, se glisser derrière les unes, se heurter à d’autres, regarder de très près ou à distance. Ce jeu sensoriel va diriger l’interprétation de chacun. Mes pièces n’ont à priori aucune raison d’être, ne portent en elles aucun message, elles sont ce qu’elles sont. J’aimerais cependant qu’elles puissent permettre au spectateur de retrouver un langage, un monde fantasmatique qui lui soit particulier.
L’expérience picturale amène forcément un questionnement et oblige à aller de plus en plus loin. Chaque pièce fonctionne comme un passage d’une expression à une autre, d’une question à une autre adressée au monde.
Chaque étape du travail m’oblige à déconstruire mes représentations du monde, à chercher dans les sphères les plus opaques un sens, un signe afin que quelque chose d’inattendu advienne et qui me contraigne à un inventer les formes d’un savoir jusque là méconnu. Chaque format de la série est à la fois unique et partenaire d’autres pièces qui s’inscrivent dans la même aventure.
Mon travail plastique relève de la trace nécessaire qui soutient mon rapport à l’existence, mon manque à être, ma solitude, adressés à l’autre pour qu’il s’y projette et s’y reconnaisse peut-être.

Nelly Bonnefis

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